Le sentiment de duperie apparaît comme une forme de nostalgie du réel. La littérature en est pleine, du genre de l’uchronie à celui du récit d’anticipation. Maxime Bondu (Tournan-en-Brie/F, *1985) examine les formes et les enjeux de notre rapport à l’histoire et de notre projection dans le futur, l’un et l’autre comme médiateurs du temps contemporain, peut-être plus que l’inverse. De ces récits, il en produit d’autres, s’insérant dans les zones d’ombre et les éclairant de l’intérieur. Il a pu réapprendre d’anciennes techniques de peinture afin de réaliser des toiles jouant de leur anachronisme (2013) ; il a pu chercher à recréer manuellement l’ampoule de Livermore, Californie, à l’époque de l’obsolescence programmée dont il devient un objet de contestation (2012) ; il a également pu exploiter des coïncidences et restaurer des images à fin, toujours, de réinvention (2012). Il recense les événements souffrant de lacunes et se prêtant par conséquent à diverses relectures, à autant de scénarii basées sur des déductions qu’il fait comme celui qui mène l’enquête. Il collectionne des objets, dépouille des archives, crée des documents inexistants à partir de leurs défauts matériels ou d’information, mais recelant peut-être un indice de l’état du monde.
Dans le cadre de son exposition à Rosa Brux, il articule plusieurs projets en cours comme des actualités de sa recherche. L’un est construit autour de l’impulsion électromagnétique (IEM), une émission d’ondes électromagnétiques qui anéantit les appareils électriques se trouvant dans son champ et qui peut, par exemple, paralyser les systèmes de communication. Elle a été découverte dans le cadre des premiers essais nucléaires et a vite été exploitée dans le domaine de la science-fiction. Autour d’une sélection de romans et de films mettant en scène l’IEM, auquel il adjoint une série de photographies retouchées des essais d’IEM américains effectués au-dessus de Hawaï au début des années 1960, Maxime Bondu dresse un imaginaire de ce phénomène (conspiration, apocalypse, etc.). L’un des autres projets que l’artiste présente à Rosa Brux s’intitule The Rosen Association. Débuté en 2012, en collaboration avec l’architecte américain Brent Martin, il s’appuie sur le texte de Philip K. Dick « Do Androids Dream of Electric Sheep ? » [Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?] (écrit en 1966 et publié en 1968), dont l’adaptation cinématographique de Ridley Scott, sous le titre de « Blade Runner » (1982), a participé à sa reconnaissance. Rosen Association est le nom de la société produisant les androïdes dont il est question, inspirés des humains et amenés à vivre au côté de ceux-ci. Maxime Bondu et Brent Martin ont réalisé les plans de construction de son siège californien qu’ils ont inscrit dans la topographie actuelle de Los Angeles. Un contexte narratif accompagne ces faux documents d’archive et décrit en détail le site et centre de recherche de Rosen Association.