Il est ici question de survie. Au pied du mur des déterminismes d’une société américaine vendant son rêve de façon toujours plus agressive, une avalanche d’artistes a déferlé avec une énergie inédite. Entre prolixité surhumaine, revendications brutes, résilience résignée et détournement du mythe du self-made man, les rappeurs américains ont transpercé les décennies récentes comme autant de symptômes autonomes des tiraillements historiques des États-Unis. Journalistes hallucinés, biographes névrosés, businessmen fascinés et débrouillards marginalisés ont construit frénétiquement une succession de discours souvent contradictoires, mais toujours saisissants de rage de vivre. Rompus à l’adversité, leur musique a vu se succéder comme autant de herses sur leur chemin les obstacles qui interdisent encore aujourd’hui l’horizontalité des rapports sociaux aux États-Unis. Au milieu de cet état de fait prolifère une musique fluide, connectée, fourmillante de verbe, capable de s’adapter avec une rapidité nouvelle aux questions culturelles, économiques et sociétales du monde contemporain. Les divers courants du rap américain offrent aujourd’hui au public une salve ininterrompue de visions, une réinvention perpétuelle du langage qui modèle nos réalités.
I ain’t tryna survive, I’m tryin’ to live vise à capturer les instants de ces méta-chroniques, individués comme autant de cris lancés aux oreilles et au regard de ceux qui les entendent, mais ne les écoutent pas.